top of page

Vidéos :  Témoignages de gagnants

Ils ne sont ni industriels, ni chanteurs, ni sportifs mais des Français presque comme les autres qui ont un jour gagné plus d'un million d'euros au Loto ou à Euro Millions mais vivent comme monsieur et madame Tout-le-monde.

 

Pas de montre bling-bling, de sac de grand couturier ou de vêtements tape-à-l'oeil: dans ce restaurant sur la plage de la station balnéaire de Valras-Plage, ils passent totalement inaperçus. Ils ont raconté comment des millions d'euros ont changé leur vie lors d'un de ces dîners entre gagnants organisés régulièrement par le service des grands gagnants de la Française des Jeux (FDJ).

 

Chaque grand gagnant, environ deux cents par an à plus d'un million d'euros, peut être aidé à sa demande par la FDJ: livret avec conseils de bon sens (déposer son chèque au plus tôt, ne pas laisser dormir l'argent, réfléchir à son futur niveau de vie ...). Il peut également retrouver d'autres gagnants dans des "groupes de paroles" ou des dîners sous l'égide de la FDJ.

 

Jacques, 59 ans, ancien artisan dans un petit village du Gard, a gagné 9 millions d'euros en février 2008 avec un ticket d'Euro Millions à 4 euros. "Il n'arrivait plus à parler", raconte sa femme Claudie. "Nous avions caché notre bulletin gagnant à la maison et, tous les quarts d'heure, il me rappelait de son chantier pour me demander de vérifier si le ticket était toujours là".

 

Sous le coup de l'émotion en apprenant qu'il avait gagné 2,2 millions d'euros en 2002 à Marseille avec un ticket de Loto à 4,20 euros, Louis, 66 ans, ex-ambulancier, a fait "un début d'infarctus" et passé la nuit à l'hôpital.

 

"Ce fut un instant magique mais nous avons passé une nuit blanche", se souvient Pauline, 45 ans, ancienne formatrice. Son ticket d'Euro Millions à 2 euros lui a rapporté 23 millions d'euros il y a tout juste un an. Finis les levers à 4h pour son compagnon Pierre, 49 ans, marchand forain en Midi-Pyrénées. Plus de centre aéré pour la petite Elena pendant que Pauline va travailler. "Notre premier plaisir a été de pouvoir partir pour la première fois en vacances tous les trois ensemble", dit Pauline. Ouverture d'un nouveau compte en banque, choix des placements: "L'année est finalement passée très vite", selon elle.

 

"Pourquoi ça m'arrive à moi?", s'est demandé Charles, 64 ans, qui a empoché un chèque de 4 millions d'euros en janvier 2010 après avoir joué 2 euros au Loto.

 

"Ce fut un choc", assurent Charles et Claudia. Ils ont fait quelques travaux dans la maison, acheté quatre appartements et "aidé" leurs deux enfants avant de s'arrêter de travailler. "On est resté comme on était avant", affirme Jacques. "Nous avions déjà un bon train de vie, et nous avons juste craqué pour une Ferrari et pour une Porsche".

 

"Ma première pensée, après avoir appris que nous avions gagné 9 millions d'euros, a été de me dire "ça y est, notre retraite est assurée", confie Claude à sa femme.

 

"Nous avons gardé nos valeurs et nous profitons de la vie sans faire de dépenses inutiles", lâche Pauline.

 

Pierrette, la femme de Louis, raconte qu'ils ont acheté "une belle villa et deux maisons pour leur fils" et glisse: "Même si l'argent ne fait pas le bonheur, ça change la vie".

Tous continuent à jouer. "Je suis persuadé que je vais de nouveau gagner", assure Louis en lorgnant sur la cagnotte de plusieurs millions d'euros remise en jeu régulièrement à Euro Millions.

 

Et vous alors, que penserez-vous et surtout que direz-vous lorsque ce sera votre tour ?

 Qui n'a pas rêvé de gagner un jour au loto, s'imaginant déjà au volant d'une Ferrari, aux commandes d'un yacht aux Antilles ou propriétaire d'un château de conte de fée ? Mais que sait-on vraiment de la vie de ceux qui sont devenus soudainement millionnaires par la grâce du hasard et de la Française des Jeux ? C'est pour répondre à cette question que les sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot ont rencontré 30 gros gagnants qui ont empoché un jour plusieurs millions d'euros. Dans leur livre, « Les millionnaires de la chance. Rêve et réalité », les témoignages attestent que devenir riche n'est parfois pas une sinécure. « Être perçu comme le riche n'est pas de tout repos », résument les deux chercheurs, particulièrement si l'on vient d'un milieu modeste. « En milieu populaire, cette ouverture des possibles est anxiogène : la richesse inattendue offre une multitude de potentialités dont on ne possède pas les clefs. Le gagnant se trouve démuni devant une plus ou moins grande fortune : il ne sait par quel bout la prendre. »

Après le coup de massue reçu par celui qui vient d'apprendre son nouveau statut de millionnaire, vient une période de désarroi et de questions. L'accompagnement de la Française des Jeux est alors capital pour surmonter le choc et se projeter dans l'avenir en apprenant à être riche. Les groupes de paroles qui réunissent les gros gagnants, parfois plusieurs années d'affilée, leur permettent de tenir le coup. Dès lors, pas étonnant que les gagnants rencontrés par les sociologues soient plutôt sages et ne succombent que très rarement à quelques folies. Les millions servent davantage à assurer l'avenir familial et parfois réaliser un rêve de toujours. Même si leur vie a forcément changé, certains gros gagnants renouent avec leur vie simple d'avant pour retrouver par exemple leurs collègues. Comme quoi s'il y contribue, l'argent ne fait pas forcément le bonheur…

La Française des Jeux aux côtés des gros gagnants

Gagner soudainement une somme importante qui efface les incertitudes matérielles peut entraîner un réel et angoissant bouleversement. C'est pour aider les nouveaux gagnants à y faire face que le service Relations Gagnants de la Française des jeux offre gracieusement ses services d'assistance et de conseil depuis 1993.

« Comme une amicale »

« Nous prenons en charge les personnes qui gagnent des sommes d'au moins 1 million d'euros », explique Brigitte Roth, responsable du service Relations Gagnants, qui mobilise trois personnes à plein-temps. « Nous avons une première mission lors de la remise du gain. Cette première étape, qui consiste en une cérémonie suivie d'un déjeuner, permet d'échanger, de rassurer les gagnants, de mieux les connaître. Après, nous leur proposons notre programme d'accompagnement. Près de la moitié des gagnants suit ce programme », explique la responsable. Outre la lecture d'un livret de conseils, les gagnants ont la possibilité, s'ils le souhaitent, de participer à des ateliers pédagogiques pour se familiariser avec divers aspects de la fiscalité, la finance, le droit de la famille, etc. Des groupes de paroles entre gagnants sont également organisés par la Française des Jeux. Il y a une quinzaine de réunions par an. « Quand on gagne, on est comme un créateur d'entreprise. On a besoin d'information et de formation ; on a besoin d'être écouté et de parler ; et on a besoin d'avoir un réseau relationnel », résume Brigitte Roth, qui garde parfois des relations avec « ses » gagnants des années durant. « C'est un plaisir pour nous et pour eux, qui jouent le rôle des parrains des nouveaux gagnants. C'est un peu comme une amicale. »

Expert

« Quand on gagne, il y a une période de désarroi »

Michel Pinçon est sociologue. Avec son épouse Monique Pinçon-Charlot, ils viennent de publier « Les millionnaires de la Chance. Rêve et réalité » (Éditions Payot, 272 pages, 18,50€).

La Dépêche du Midi. - Avez-vous trouvé des similitudes dans le parcours des 30 gagnants que vous avez rencontrés ?

Michel Pinçon. - La similitude forte, c'est une certaine déstabilisation à la nouvelle du gain. Tous jouent pour gagner bien sûr ; cette éventualité a été rêvée, fantasmée. Ils y ont pensé mais pas de façon raisonnée. Quand cela arrive, ils sont pris de court. Quand ils gagnent plusieurs millions d'euros, certains se trouvent mal, y compris physiquement.

Le choc est psychologiquement trop violent ?

Oui, il y a une sorte de désarroi et la découverte de problèmes auxquels ils n'avaient pas pensé. Comment on va faire ? À qui on va le dire ? Faut-il le dire à la famille, aux collègues, aux enfants ?

D'où l'importance de l'aide offerte par la Française des Jeux ?

Tout à fait. On est très positif sur ce service et les gagnants que nous avons rencontrés sont extrêmement reconnaissants à la Française des Jeux de les réunir lors de ces ateliers-réflexion. Ils apprennent à gérer leur richesse et ce qui est important, c'est qu'ils parlent entre eux, c'est-à-dire à des gens qui connaissent les mêmes difficultés. Ces lieux d'échange sont comme un cercle dans lequel ils sont en confiance.

On a l'impression que les gagnants veulent conserver une vie normale et sont très raisonnables, ne font pas de folies.

C'est vrai. Hormis deux cas où les gagnants ont complètement changé de vie parce que le décalage devenait trop important avec leur vie d'avant, ce que l'on constate, c'est que l'argent du gain permet aux gagnants de réaliser une part importante de leur être. Le manque d'argent les empêchait d'avancer. En général, les gagnants du loto placent leur argent de façon prudente, ils ne flambent pas et ne font pas de folies. Beaucoup montent d'ailleurs une petite entreprise et certains reviennent dans leur travail.

Témoin

« J'ai mis six mois à m'en remettre »

Jacques Ansart* a gagné 53 millions de francs (environ 8 millions d'euros) en 1991 avec son frère Edmond. Il a appris qu'il était heureux gagnant le matin de Noël après avoir réveillonné toute la nuit. Il vit dans le Grand Sud.

Qu'avez-vous ressenti à l'annonce de la bonne nouvelle ?

Sur le moment on est vraiment déstabilisé. Avec le temps, on réalise, on se fait à l'idée d'être millionnaire. Il m'a fallu six mois pour m'en remettre.

Avez-vous eu peur de le dire par crainte des sollicitations ? Avez-vous caché que vous étiez le gagnant ?

Non pas du tout. Mon frère et moi avons décidé de le dire et tout s'est très bien passé. Notre famille, nos amis ont participé à la fête que nous avons organisée. J'ai même versé une « prime » de 2 500 F à tous mes collègues (300). Nous avons bien sûr eu des sollicitations, mais rien de bien méchant.

Ces millions ont-ils changé votre vie ?

J'étais fonctionnaire du trésor public. Avec mon frère nous avons créé une SARL et racheté le magasin d'instruments de musique que je fréquentais. Nous avons aussi créé une SCI.

* Comme tous les gagnants du livre, les noms et prénoms ont été changés.

La persévérance de 22 employés d'une société de cosmétiques a payé. Ils ont finalement empoché le pactole soit 12 millions d'euros à se partager.

Les trois ans de mise collective auront fini par rapporter gros. Les 22 employés de la société BCM à Vitré, en Ile-et-Vilaine ont empoché le pactoledu loto, soit 12 millions d'euros. A parts égales, ils gagnent chacun 545.456 euros, un bel accélérateur de projets devenu réalité à l'issue du tirage du 28 décembre 2015.

Réuni lundi soir dans le salon d'un hôtel rennais, le responsable du service des relations à la Française des jeux les a mis en garde. "Vous allez le déposer à la banque et réfléchir. Attention pas de décision hâtive", rapporteLe Parisien.

Des gagnants issus de milieux modestes

Dans cette histoire, la persévérance des parieurs a fini par payer. Les modalités de mise ont été identiques pendant trois ans: même numéros pour les trois tirages de la semaine et même somme d'argent, soit un abonnement de 8 euros par mois.

La plupart d'entre eux sont ouvriers. "Ce qui est très bien c'est que ça se passe dans une entreprise avec ouvriers, des employés, des cadres ensemble, et que cela crée un sentiment de fraternité. Ils ont touché ce chèque lundi et ils se réjouissent collectivement et de plus, les propositions d'utilisation de cette somme sont extrêmement raisonnables. Pour une majorité c'est d'aider leurs enfants", juge Pierre Méhaignerie, le maire de Vitré.

Pas de Rolex au bras ou d’autres signes extérieurs de richesse, juste un jean, une chemise et des baskets aux pieds. Et pourtant, ce couple de Chalonnais d’une quarantaine d’années a gagné, le 7 novembre 2008, date d’un tirage de l’Euro Millions, 15 millions d’euros.

« Rien n’a changé… »

« Rien n’a changé, et tout a changé. On continue à vivre simplement, mais on sait très bien que notre vie ne sera plus jamais la même… », se plaisent-ils à dire.

Avant de remporter le pactole, la famille avait parfois du mal à boucler les fins de mois. « Je venais de perdre mon emploi, alors il fallait faire très attention aux dépenses. J’avais même dit à mon mari, fidèle joueur du loto, d’arrêter de jouer ! Heureusement qu’il ne m’a pas écouté », se souvient la mère de famille. Depuis un an, il jouait les mêmes numéros : 1, 9, 12, 17, 18 (et les étoiles 3 et 4). « Il les avait choisis en consultant leur fréquence de sortie sur le site de la Française des jeux et, par hasard, ces chiffres correspondaient à des dates personnelles. Je continue encore de jouer régulièrement au loto », poursuit-elle.

Pas de grosse folie

Une fois le chèque encaissé, leur premier achat a été une belle voiture. Et quand on leur demande ce qui n’est plus comme avant, ils répondent « tout », même s’ils ne cessent de répéter qu’ils n’ont rien changé à leur mode de vie, comme l’explique le Chalonnais : « Nous ne faisons pas de folie. On en fait profiter notre famille, les frères et sœurs, les neveux et nièces... Un jour, pour leur faire plaisir, on les a lâchés dans le magasin. Ils pouvaient prendre ce qu’ils voulaient. On s’était quand même fixé un budget. Nous avons fait aussi deux voyages à l’Ile Maurice, et comptons en faire bientôt un autre en famille. Au lieu de partir en vacances chez l’habitant dans le Sud, comme on le faisait auparavant , on s’est acheté un appartement au même endroit. Maintenant, quand on fait une fête, au lieu de boire du crémant, on boit du champagne. Quand on va au restaurant, au lieu de choisir le menu à 27 €, on prend celui à 50 €... En revanche, on continue toujours à regarder les prix. Avant, on était obligé de faire attention, et on n’a pas encore perdu cette habitude. » Sa femme avoue continuer « de faire les soldes » et parfois « d’acheter ( l’article) le moins cher ».

Les Saône-et-loiriens n’ont pas changé d’amis depuis qu’ils sont millionnaires et lui continue régulièrement d’aller voir son ancien patron et ses ex-collègues de travail. « J’ai bien eu des amis, que je n’avais pas vus depuis longtemps, revenir et de la famille, que nous ne fréquentions pas avant, réapparaître. Je ne suis pas dupe. On n’est sans doute plus les mêmes, c’est sûr. Et pourtant, on veut rester comme on est. Dans cette histoire, les plus gênés sont nos amis et notre famille. Ils ne devraient pas. »

Pourtant, les ragots qui leur remontent aux oreilles les font souffrir et les blessent. « J’ai eu vent que l’on me disait parti aux États-Unis avec ma psychothérapeute. C’est n’importe quoi. D’ailleurs, je n’ai pas de psy… quelque chose ! »

« On se lève encore »

Encore aujourd’hui, ces heureux gagnants, parents de deux garçons, ont parfois du mal à réaliser. « Il m’arrive de me pincer pour savoir si je ne rêve pas. Il nous faut encore du temps pour nous habituer », raconte le mari.

Comme de nombreux autres gagnants du loto, l’ancien magasinier participe à des ateliers pédagogiques à Paris, Marignane ou encore Vitrolles, mis en place par le service Relations gagnants de la Française des jeux. Là-bas, on les familiarise avec divers aspects de la fiscalité, la finance, le droit de la famille… « J’y apprends à parler le même langage que mon banquier. En plus, c’est bien de pouvoir discuter de ce qui nous arrive à des personnes qui vivent la même chose que nous. Ce n’est pas évident d’aborder le sujet avec notre famille ou nos proches, car ils ne comprendraient pas toujours », déclare le gagnant bourguignon.

Dans le couple, les décisions se prennent toujours à deux. « Pour l’instant, nous avons, comme la plupart des autres gagnants, investi le capital dans des placements à court terme, puis des placements classiques, un peu d’assurance-vie pas forcément très rémunératrice, mais très sécurisée. On n’a pas encore pensé à l’immobilier. On y réfléchit. Maintenant, l’argent n’est plus un problème. Désormais, notre angoisse est de savoir s’il est bien géré et bien placé. On nous a dit qu’il fallait trois ans pour y voir plus clair. Nous vivons sur les intérêts, sans trop toucher au capital, sauf pour acheter la maison, l’appartement pour les vacances et la voiture. »

Le couple continue à se lever le matin, même s’il avoue vivre comme de jeunes retraités. « D’ailleurs, on est un peu comme eux, on trouve toujours à s’occuper. » Madame cale les rendez-vous et Monsieur les honore. « Il ne faut pas croire, mais c’est un boulot, presque à temps plein. Enfin, on ne va pas se plaindre. Depuis le jour où nous avons gagné, notre vie n’est que du bonheur. »

J'ai gagné 15 millions à l'Euromillions, et mon patron m'a demandé de démissionner.

Pour nous, tout a basculé le 7 novembre 2008. Ce jour-là, les numéros 1-9-12-17-18, et le 3 et 4 en étoiles, sont (enfin) sortis. Ce sont ceux que nous jouions chaque semaine depuis six mois.

 

Nous n’avons appris cette "victoire" que le lendemain du tirage. Retenus dans un dîner avec des amis le vendredi soir, nous n’avions pas pu avoir connaissance des résultats. Le samedi matin, c’est en consultant le télétexte que nous avons vu que l’intégralité de nos numéros étaient sortis…

 

Le buraliste était dubitatif

 

Cela faisait des années que nous jouions cinq grilles chaque semaine. Et pour mettre toutes les chances de notre côté, nous avions répertorié dans un dossier Excel à quelle fréquence sortait chaque numéro :

Lorsque vous prenez conscience que vous être le gagnant d’une telle cagnotte, c’est une charge d’adrénaline de + 500% que vous recevez.

 

Plein de sentiments ambivalents se bousculent dans votre tête. Il y a une joie immense et beaucoup d’excitation. Mais aussi de l’incrédulité. On saute de joie partout dans la maison avant de se mettre à pleurer, puis à rire de nouveau. On passe d’une émotion forte à une autre, comme ça, sans vraiment parvenir à se maîtriser.

 

Nous avions déjà remporté de petites sommes, de l'ordre de 30, 50 ou 60 euros, mais là, avec 15 millions, on est "ailleurs". C’est merveilleux et en même temps très abstrait. Comme si l’impensable venait de se produire. Vous êtes complètement chamboulés.

 

Vous sortez dans la rue, pour aller vous présenter au buraliste et vous avez déjà l’impression que tout le monde vous regarde différemment, comme s'il était écrit sur votre front que vous étiez le gagnant de la semaine. 

 

Or, c'est plutôt l'inverse. Le buraliste s'est montré assez étonné voire dubitatif quand on lui a annoncé que nous étions les fameux gagnants. Il n'y a pas cru tout de suite. C'était une première pour lui aussi !

 

Gagner à l'Euromillions, c'est réapprendre à faire des maths

 

Heureusement, on est très vite pris en main par la FDJ. Ils commencent par nous conseiller de mettre notre ticket dans un coffre, puis ils nous rassurent, ils nous disent de prendre le temps de bien réfléchir à la suite, d’être prudent. Un psychologue est là pour nous écouter, nous conseiller. Des formations sont également proposées pour tout ce qui touche à la gestion financière.

 

Cette aide est précieuse car les premiers mois sont vraiment difficiles. Il y a de l’appréhension, de l’angoisse. On le vit aujourd'hui de mieux en mieux mais, au début, on ressentait de la gêne, on culpabilisait, on se posait des tonnes de questions sur ce qui allait se passer.

Pendant six mois, toutes ces interrogations vous empêchent de dormir. Psychologiquement, physiquement, vous êtes raplaplapla. Vous vous faites des films. Le moindre regard, la moindre réflexion d'un voisin ou d'un proche vous font douter. 

 

Le choc est tellement fort, la somme tellement importante et irréelle, que vous en venez à vous dire que des inconnus vont tenter de kidnapper vos enfants par exemple. On ne devient pas paranos, mais pas loin.

 

Il y a surtout la peur de perdre des amis, de la famille. Cela n'a heureusement pas été le cas, mais, inévitablement, des bruits ont commencé à courir à notre sujet là où nous habitions. Dès les premiers mois, des rumeurs qui circulaient nous ont été rapportées. Elles venaient notamment de là où les gens du village tapaient les cartes. Il y avait aussi des curieux qui tournaient autour de notre maison.

 

Très vite, un déménagement est apparu inévitable.

Gagner 15 millions d'euros, c'est aussi apprendre un tout nouveau langage, celui des banquiers, des notaires. Gagner à l'Euromillions, c'est réapprendre à faire des mathématiques. C'est un vocabulaire que nous ne connaissions pas et qui était un peu intimidant. Vous êtes habitués à gérer un "portefeuille" de 3.000 euros par mois et, brusquement, il passe à 3.000 euros par jour... 

 

Notre banquier habituel, quand nous sommes allés le voir, nous a tout simplement dit qu'il ne pouvait pas gérer un telle somme, que nous devions nous adresser à une banque privée. Cela surprend, forcement. On ne savait même pas ce qu'était une banque privée.

 

Mon patron m'a dit d'arrêter de travailler

 

Notre quotidien a changé, c'est indéniable. Pour commencer, nous ne travaillons plus. Mon employeur m'a conseillé d'arrêter (Christian).

 

Le 12 novembre, quelques jours après le fameux tirage, je reprenais le travail à 7h. Je suis allé voir mon patron pour lui annoncer. Il m'a félicité et accordé quelques jours de congés pour que je puisse gérer tout ce qui était en train de me tomber dessus. Et, très vite, il m'a dit qu'il serait préférable que j'arrête car il avait peur que cela éveille de la jalousie au sein de l'entreprise et affecte l'atmosphère générale.

 

Il avait vraisemblablement raison, mais ce fut dur à accepter. La peur du vide, de l'inoccupation. J'avais la quarantaine et je ne me voyais pas jeune retraité. Mais on se fait très bien à "cette" vie. 

 

Notre quotidien n'a pas été bouleversé – nous faisons nos courses toujours au même endroit – mais il est forcement devenu bien plus confortable. À tous les niveaux. Nous avons troqué la cafétéria pour les restaurants, le crémant pour le champagne...

 

Il y a eu de grosses dépenses, comme l'achat d'une nouvelle voiture – un 4x4 de marque allemande – que nous avons commandé avant même d'avoir reçu notre chèque. Ou encore ce caddie de 484 euros, entièrement remplis d'alcool, pour trinquer avec les amis et la famille peu de temps après le tirage. Nous en avons aussi profité pour partir en voyage, direction l'île Maurice. C'était le voyage de noces que nous n'avions pas eu. Depuis, nous y retournons trois fois par an... 

 

Mais la voiture, le déménagement et les voyages restent à ce jour nos plus grosses "folies", en cinq années. Nous nous en sommes arrêtés là pour ce qui est des grosses dépenses.

 

Nous jouons toujours

 

Un peu plus de cinq ans après ce 7 novembre 2008, il y a une forme de nostalgie.

 

Comme beaucoup de gagnants, on a recommencé à jouer de temps en temps. Il nous arrive même de gagner de petites sommes. Il est évident que nous ne jouons pas pour l'argent en tant que tel mais, sans doute, parce que l'on a l'envie de revivre un moment aussi fort, aussi intense. Quand vous avez connu ça dans votre vie, vous n'avez qu'une envie : revivre cette émotion un jour.

 

Si les premiers mois sont difficiles, aujourd'hui, on nage en plein bonheur. C'est une formidable opportunité que nous avons eu. Nous avons le sourire du matin au soir, même en dormant. Nous pouvons faire plaisir à notre famille, à nos enfants, à nos amis. Ce n'est pas rien. Nous avons conscience de la chance qui est la notre.

 

Mais il a bien fallu trois ans pour accepter ce qui nous est arrivé et surtout pour le "digérer". Pour que le sentiment de culpabilité que nous éprouvions s'efface et que l'on assume pleinement cet argent.

bottom of page